110 – LA PUISSANCE D’UN REGARD …
9 janvier 2013
Hier j’ai rencontré un regard … Un regard sombre, un regard farouche, un regard qui a croisé le mien avec curiosité mais également témérité. Un lac sombre, fortement cerné de noir, s’est plongé dans le lac bleu de mes yeux.
Nous sommes à Oman, comme Yves vous l’a déjà écrit, et ce regard appartenait à une jeune femme voilée de noir. Nous étions au supermarché, chacune à une caisse, attendant notre tour, lorsque nos regards se sont croisés. D’abord timides, nous nous sommes apprivoisées et son regard si farouche s’est adouci lorsque mes lèvres se sont étirées pour lui sourire. Dans l’instant, son regard de braise s’est transformé en yeux de biche, doux et pétillants …
Je ne voyais que ses yeux et pourtant je sais qu’elle m’a souri.
Je ne voyais que ses yeux et pourtant j’ai ressenti sa personnalité.
J’ai « vu » son charme, son caractère un peu rebelle, sa curiosité pour les autres, son autorité.
Un simple regard peut-il donc nous en dire tant ?
Cela m’a fait beaucoup réfléchir sur tous nos jugements occidentaux, parfois si féroces et intolérants. Je ne plaide pas pour voiler les femmes et les cacher sous de grands manteaux noirs, loin de moi cette idée. Simplement, cette rencontre m’a fait prendre conscience que chaque pays a ses codes, ses croyances, ses religions et ses habitudes : cela s’appelle la culture. Et, à l’intérieur de chaque culture, les femmes et les hommes s’installent le plus confortablement possible. Bien sûr, il y a des cultures plus « confortables » que d’autres. Mais, en y réfléchissant bien, chacune présente certains avantages !
Je me suis donc penché sur la culture de la femme occidentale, que je pense connaître plutôt bien vu que j’en fait partie. Combien d’entre nous plaignent ces « pauvres » femmes voilées ? Et pourtant, en me plongeant dans cette culture, dans ce pays, je suis étonnée de ne pas ressentir tant de frustration ni de tristesse chez les femmes. En tous les cas beaucoup moins que je ne le pensais et certainement pas plus que chez mes sœurs dévoilées, dénudées, exposées …
Je crois que nous avons beaucoup à apprendre de ces femmes : elles n’ont nul besoin d’être à moitié nues pour séduire ! Chez la femme orientale, la séduction passe par les attitudes, les regards, les gestes souvent très élégants. Elles évoquent mais ne se livrent pas …
Autour de la piscine d’un grand hôtel, tout près de notre maison omanaise, je me retrouve parmi les hommes et les femmes occidentaux. Jeunes et moins jeunes se dorent au soleil dans ces fameux « deux-pièces » soi-disant si sexy … Je suis un peu perdue et même, je dois l’avouer, un peu choquée après toutes ces heures à traverser des villages où hommes et femmes évoluent dans les rues élégamment vêtus de leurs longues robes blanches pour les uns et de leurs longs voiles colorés ou noirs pour les autres. Hommes et femmes sont très prudes et restent toujours vêtus, même au bord de la plage …
C’est ainsi qu’un élégant ballet se joue dans les rues des villages, hommes et femmes évoluant avec grâce au milieu des chèvres et des ânes.
Point de ventres proéminents, point de chairs un peu molles, point de silhouettes disgracieuses : hommes et femmes sont vêtus de la tête au pied et le vent fait danser leurs vêtements à chaque pas … C’est vraiment très beau !
C’est pourquoi ce bord de piscine m’a perturbé : j’ai vu des hommes et des femmes de tous âges vêtus d’un simple maillot, offrant leurs corps plus ou moins harmonieux au Dieu Soleil. Où est la séduction ? Tout est offert, tout est même exhibé : plus de mystère, plus de jeu, peu d’élégance …
Je me pose alors cette question, en revenant à ce magnifique regard croisé hier matin : sans tomber dans les extrêmes -ce que nous faisons tous de chaque côté du globe- pourquoi ne réapprendrions-nous pas à nous vêtir avec élégance ? Pourquoi ne recontacterions-nous pas la pudeur de nos grands-mères ? Elles n’étaient pas voilées mais elles savaient cacher pour mieux dévoiler à celui qu’elles avaient choisi … Elles savaient jouer du regard, elles savaient séduire avec leurs mouvements : elles n’avaient pas besoin de montrer pour évoquer.
Nous avons acquis, grâce à elles, notre indépendance. Aujourd’hui, la femme occidentale est libre de mener sa vie à sa guise. Elle peut se marier, avoir des enfants, travailler ou bien rester célibataire, adopter, être hétéro ou homosexuelle. Elle peut voyager librement, elle peut même s’offrir un « prostitué » ! Mais cette liberté chèrement acquise lui a fait perdre de vue une grande partie de sa féminité … Aujourd’hui la femme séduit comme un homme : l’un et l’autre sont finalement devenus des objets sexuels ! Plaire à un homme ou une femme c’est … « je vais avoir une relation sexuelle avec lui ou elle ». Point. Bien sûr, cela peut devenir … « et plus si affinité ». Mais pas toujours, et pas souvent.
Et si le « dénuement » de nos corps était le symbole de notre « dénuement » intérieur ? Et si nous avions perdu notre charme à force d’étaler nos abattis ?
Vous voyez, un simple regard peut vous emmener loin ! Celui de cette jeune femme était magnifique. J’ai été heureuse de partager sa beauté avec vous …
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